Conseil municipal du 23 mai 2024 (3e partie) : "choc des savoirs" deux visions très différentes

Les questions éducatives reviennent régulièrement en débat lors des séances du Conseil municipal. C’est une très bonne chose, tant il est indispensable à notre niveau d’être des acteurs attentifs pour contribuer à l’amélioration du fonctionnement du service public de l’éducation.

Depuis plusieurs années nous constatons une régression des moyens avec de plus en plus de difficultés pour les enseignants, comme pour les élèves, dont beaucoup restent au bord du chemin. Face à ses échecs, le gouvernement essaie de passer en force pour à la fois engager un tri social et tenter de restaurer une autorité de façade qui lui permettra de communiquer sur les bons résultats réservés à une certaine élite. Parents d’élèves et enseignants sont donc légitimement mobilisés pour refuser ce "choc des savoirs" rétrograde et discriminatoire qu’on veut nous imposer.

Notre groupe Saint-Michel en Commun, en lien avec les élu-e-s du groupe Avenir écologique et solidaire a donc déposé le 21 mai une  motion à soumettre au vote du Conseil municipal en appui à cette mobilisation.

Puis, quelques heures avant la séance du 23 mai, la directrice de cabinet du maire nous a adressé une "motion alternative portée par les élu-e-s de la majorité municipale". Il s’agissait effectivement d’une motion ALTERNATIVE à la nôtre.

- La droite estime que "les mesures annoncées par le gouvernement semblent incomprises", nous pensons tout simplement (comme la quasi-unanimité des associations de parents d'élèves et des syndicats d'enseignants) que ces mesures sont néfastes.

- La droite demande au gouvernement de "prendre le temps de plus de concertation pour expliquer la réforme du "choc des savoir", nous constatons seulement que le gouvernement a décidé, sans la moindre concertation, et qu'il faut clairement lui dire de retirer cette mauvaise réforme.

La majorité municipale a une nouvelle fois tendance à nous prendre pour des idiots et/ou des demeurés. Comme il lui "semble" que nous n'avons pas "compris" la portée de cette réforme, par charité, sans doute, elle veut bien "prendre le temps de nous l'expliquer" !

Après un échange de bonne tenue et sans concession avec l’adjointe chargée de la vie scolaire, les deux motions ont été mises au vote, car Madame le maire a bien constaté qu’il était impossible de rapprocher les avis. Et, oh surprise, les deux motions ont été adoptées, la droite, dans sa pratique clientélaire habituelle, jouant encore une fois au "en même temps" !

Notre motion a été adoptée par 7 voix POUR, 0 contre, la majorité municipale se contentant de s’abstenir !

Puis la motion de la droite a été adoptée par 26 voix POUR, mais en totale cohérence, les élus des deux groupes d’opposition ont voté contre.

Vous trouverez ci-dessous l’intégralité des deux motions présentées, ainsi que la déclaration des associations de parents d’élèves et des syndicats enseignants lors de la réunion du Conseil Supérieur de l’Education du 22 mai, dont j’ai donné lecture lors du Conseil municipal.

 

Motion de soutien aux parents d’élèves et aux personnels de l’éducation nationale mobilisés pour la réussite scolaire de tous et l’amélioration des conditions d’enseignements au sein de l’école publique

Présentée par les Groupes des élu-e-s Saint-Michel en Commun et Avenir écologique et solidaire

Considérant les réunions d’information des 27 mars et 25 avril 2024, organisées à Saint-Michel-sur-Orge par les parents d’élèves FCPE, avec la participation d’enseignants.

Considérant les constats présentés sur les inquiétantes conséquences de la mise en œuvre des mesures intitulées « Choc des savoirs » : tri social des élèves, moins de demi-groupes pourtant nécessaires à certains apprentissages (langues, labo, sciences…), disparition de la dynamique collective de classe, complexification des emplois du temps, stigmatisation des élèves en difficulté et freins à leurs aspirations, surcharges des classes, recrutement aléatoire de professeurs non-qualifiés…

Considérant les différentes mobilisations organisées depuis trois mois pour un « choc des moyens humains et financiers » au sein du service public de l’Éducation nationale.

Considérant que les mesures annoncées par le gouvernement, sont prises sans concertations avec les acteurs éducatifs de la société, ni débat au parlement.

Considérant que ces dispositions dessinent les contours d’un modèle d’école passéiste qui vise à généraliser le tri des élèves dès le plus jeune âge, notamment par les groupes de niveaux, dont l’expérimentation en 1983 fut un échec.

Considérant la sélection opérée à travers la transformation du brevet en examen d'entrée au lycée général, technologique ou professionnel.

Considérant que ce projet contient l’esquisse d’une société où la jeunesse se trouve assignée à ses positions scolaires et sociales.

Considérant les importantes restrictions budgétaires, la dégradation de certains locaux, la détérioration des conditions d’enseignement, les recrutements insuffisants, les enseignants non remplacés, le cumul de multiples réformes contradictoires sur les programmes, la remise en cause des libertés pédagogiques.

Considérant que l’École publique se doit d’être ambitieuse pour chacun des enfants qu’elle accueille, afin d’accorder à tous le droit au savoir et à l’éducation, quel que soit son milieu d’origine.

Le Conseil municipal de Saint-Michel-sur Orge demande au gouvernement :

  • d’abandonner cette réforme du « choc des savoirs », destructrice des principes d’égalité, d’intégration et d’émancipation.
  • de doter le service public de l’Éducation nationale de moyens plus importants pour assurer la réussite scolaire de tous.

La motion sera transmise au Premier ministre, à la Ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse et à la Directrice académique des services de l'Éducation nationale de l'Essonne.

 

Motion portée par le groupe Saint-Michel Ensemble

Pour la réussite scolaire de tous les élèves

Considérant les résultats à la baisse de la France dans le classement PISA 2022 ;

Considérant les résultats des évaluations nationales ;

Considérant les réunions d’information des 27 mars et 25 avril 2024, organisées à Saint-Michel-sur-Orge par les parents d’élèves FCPE, avec la participation d’enseignants ;

Considérant les différentes mobilisations organisées depuis trois mois pour un « choc des moyens humains et financiers » au sein du service public de l’Éducation nationale ;

Considérant que les mesures annoncées par le gouvernement semblent incomprises par les acteurs de l’enseignement ;

Considérant la réforme opérée à travers la transformation du Diplôme National du Brevet (DNB) en examen d'entrée au lycée général, technologique ou professionnel, sans création de classes prépa-lycée en nombre suffisant (une seule classe prévue en Essonne à Ris-Orangis) ;

Considérant le manque de moyens pourtant nécessaires à la bonne mise en œuvre de cette réforme, notamment les recrutements et la Dotation Horaire Globale (DHG) ;

Considérant l’échec du Collège unique et la difficulté de faire progresser tous les élèves dans des groupes classes très hétérogènes

Considérant la nécessité d’adapter les enseignements au besoin de chaque élève plébiscitée par 80% des enseignants ayant répondu à la consultation en ligne ;

Considérant que l’École publique se doit d’être ambitieuse pour chacun des enfants qu’elle accueille, afin d’accorder à tous le droit au savoir et à l’éducation, quel que soit son milieu d’origine.

Le Conseil municipal de Saint-Michel-sur Orge demande au gouvernement :

  • De prendre le temps de plus de concertation pour expliquer la réforme du « Choc des savoirs » ;
  • De doter le service public de l’Éducation nationale de moyens plus importants pour assurer la réussite scolaire de tous.

La motion sera transmise au Premier ministre, à la Ministre de l’Éducation nationale et de la jeunesse et à la Directrice académique des services de l'Éducation nationale de l'Essonne.

 

Conseil Supérieur de l’Éducation 22 mai 2024

Monsieur le Président, Monsieur le Directeur général, Mesdames, Messieurs,

Depuis plusieurs mois, s’amplifie une mobilisation contre le Choc des savoirs, et au-delà, contre la politique éducative des ministres qui se succèdent depuis 2017 et qui mettent en place des réformes affaiblissant le système scolaire là où il faudrait le renforcer.

Nos organisations FCPE, FSU, UNSA Éducation, FO, CFDT Éducation Formation Recherche publiques, CGT Éduc’Action et Sud Éducation dénoncent l’ensemble des mesures, du premier degré au second degré, qui signent une certaine vision de la société, celle du tri et de l’assignation sociale, dangereuse pour notre démocratie.

Un pays où la jeunesse se trouve assignée à ses positions scolaires et sociales court un grave danger démocratique. Le choc des savoirs est une attaque frontale de l’École publique. Il est synonyme d’un retour en arrière sans précédent, en revenant sur les acquis de 60 ans de démocratisation scolaire. Les mesures mises en place (groupes au collège, classe de prépa-lycée, obligation d’obtenir le DNB pour poursuivre sa scolarité) visent à trier et sélectionner les élèves, à freiner leur parcours quand il faudrait avoir les moyens de mieux les accompagner. Quant à la labellisation des manuels, elle vise à imposer des méthodes pédagogiques qui ne font pas consensus, au détriment de la liberté pédagogique des enseignants et de leur professionnalité.

Ces décisions ont toutes un point commun, elles ne sont pas demandées par les professionnels de l’École et les parents d’élèves qui savent que les voies de la réussite ne se trouvent pas là.

Les nouveaux programmes en cours de consultation (français/maths cycle 1 & 2) ou présentés ce jour au CSE comme le programme d’EMC (enseignement moral et civique) sont révélateurs de cette politique. Les programmes de cycle 1 & 2 ne laissent pas aux enseignants la possibilité de s’adapter au rythme d’apprentissage de chaque élève, si importants à cet âge. Et que dire de l’absence de référence aux élèves à besoins éducatifs particuliers, dont les élèves en situation de handicap, qui sont quasi absents de ces programmes ?

Comme si aujourd’hui, on pouvait encore penser qu’une classe est composée d’un groupe d’élèves types sans différences et sans particularités. Le programme d’EMC ne permettra pas de faire de nos jeunes des citoyens acteurs de leur citoyenneté, il vise à modeler des jeunes qui apprendront par une pédagogie descendante ce qu’est un citoyen.

Pour nos organisations, cette entrée ne permettra pas de construire de futurs adultes éclairés et émancipés. Pas plus que de « garder » les élèves de 8h à 18h au collège, sans projet éducatif préalablement défini, ni recrutement massif des personnels. Pas plus que de décréter un plan sur l’autorité, de manière précipitée et artificielle. Les déclarations d’intention, puisque tel est le projet du gouvernement, n’amélioreront pas le respect de l’autorité.

L’École que construit le gouvernement va à rebours de ce qu’est l’École d’aujourd’hui, de ce que sont les élèves d’aujourd’hui.

C’est pourquoi, ensemble, nos organisations réaffirment avec force leur attachement au projet scolaire de l’École publique, laïque, gratuite et obligatoire.

Nous serons dans la rue partout en France ce samedi 25 mai avec l’ensemble des concitoyens ayant prévu de nous rejoindre pour exiger l’abandon de toutes les mesures du "Choc des savoirs" ainsi que les moyens budgétaires et humains nécessaires au bon fonctionnement de l’École publique.

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