Budget 2023 du CCAS : décalage avec la réalité sociale et déficit inquiétant à l'ÉHPAD

Le Conseil d’Administration du Centre Communal d’Action Sociale s’est réuni mercredi 15 février 2023. J’y suis le seul représentant de l’opposition face à 5 élu-e-s de la majorité, madame le Maire, présidente de droit, n’assistant jamais aux réunions.

Le Conseil d’Administration est complété par 6 représentants d’associations, cooptés par le maire.

Je détaille dans cette note le budget du C.C.A.S., présenté lors de cette réunion, qui se présente sous la forme d‘un budget principal et de deux budgets annexes : celui du Service d’Accompagnement et d’Aide à Domicile (SAAD) et celui de l’EHPAD des Grouettes, qui prend la forme d’un État Prévisionnel des Recettes et des Dépenses (EPRD). J’évoquerai également un point abordé en questions diverses, l’Analyse des Besoins Sociaux (ABS).

Le budget principal du CCAS

Ce budget primitif fera l’objet d’un budget supplémentaire au mois de juin pour y intégrer le résultat (sans doute excédentaire) des comptes de l’exercice 2022.

La section de fonctionnement est équilibrée en dépenses et en recettes à hauteur de 1 272 794,00 €. La principale recette provient de la subvention de la ville pour 1 072 584 €, soit une légère hausse de 33 907 € (+ 3,26%), inférieure au niveau de l’inflation. Parmi les autres recettes, il est signalé une baisse de près de 9% pour le portage des repas du fait de la diminution du quotient familial des usagers bénéficiant de ce service, signe d’une aggravation des situation sociales.

Au niveau des dépenses, les frais de personnel s’élèvent à 441 900 €, en hausse de 15% par rapport à 2022. Cette évolution provient de la prise en compte, en année pleine, d’une revalorisation pour les agents de catégorie C, de la hausse du SMIC et du dégel du point d’indice.

Parmi les autres charges de gestion courante, j’ai relevé les baisses importantes des subventions versées au budget du SAAD (256 474 € contre 280 375 € en 2022) et à l’EHPAD des Grouettes (80 000 € contre 178 920 € versés en 2022. Malgré la précarité en augmentation, les crédits au titre de l’aide sociale restent figés à hauteur de 48 000 €, tout comme les aides en faveur des seniors à hauteur d’un dérisoire 20 000 €.

Les dépenses et recettes prévisionnelles d’investissement sont essentiellement des écritures d’ordre pour 3 000 €.

Le budget annexe du maintien à domicile (SAAD)

Le montant total du budget de fonctionnement en recettes et en dépenses est de 697 006 € (pratiquement équivalent aux 701 907 € votés en 2022).

Au niveau des recettes, les produits de la tarification sont en hausse de 4,64 % du fait notamment de la hausse des produits à la charge des usagers (+ 10 000 €) pour atteindre 160 000 €. Par contre, le montant de la dotation du Conseil départemental de l’Essonne reste figé à 247 730 €. La subvention d’équilibre versée par le C.C.A.S. n’est plus que de 256 474 €, contre 280 375 € inscrits au budget 2022.

Les dépenses afférentes à l’exploitation courante sont en baisse de 9,04% et celles concernant le personnel sont en hausse de 2,82% par rapport au BP 2022. L’évolution des charges de personnel est moins importante que sur les autres budgets, car il avait été prévu lors du vote du budget 2022 l’élargissement éventuel du Ségur de la santé aux aides à domicile, dépense qui n’a pas été réalisée !

Globalement, ce budget est très insuffisant pour couvrir les besoins concernant un maintien à domicile de qualité pour les personnes âgées. Le nombre des personnes de plus de 70 ans est en augmentation constante dans la ville. Les personnes qui bénéficient du service de maintien à domicile vieillissent et nécessitent davantage d’attention. Le personnel de son côté vieillit également et a besoin de davantage de temps auprès des personnes qu’il accompagne. Au lieu de dégager des moyens supplémentaires et de créer des postes, notamment pour développer le service très limité du week-end, la majorité continue à faire des économies…

Le budget de l’EHPAD des Grouettes

Le budget, qui se présente sous la forme d’un État Prévisionnel des Recettes et des Dépenses (EPRD) n’est pas soumis à l’équilibre strict. Le document présenté annonce un déficit de 290 717,61 € (en 2022, il affichait un excédent de 28 692,67 €). Le rapport présenté indique que ce déficit, après intégration des mouvements comptables sans flux financiers, conduit à prévoir une insuffisance d’autofinancement de 232 214,61 €.

Les charges afférentes à l’exploitation courante sont prévues à hauteur de 663 941 €. Cela représente une augmentation de 119 363,48 € par rapport au réalisé estimé de 2022, soit une hausse de 21,92%. Cette forte hausse est due principalement à la restauration (380 000 € en 2023, contre 336 050 € inscrit au budget 2022) avec l’application du fort taux de révision du marché de restauration (+10,29 %) et la hausse du taux d’occupation, qui nécessite davantage de repas. Les dépenses de chauffage prévues à 96 000 € sont en hausse de 20 000 € par rapport au réalisé estimé en 2022. Les dépenses de blanchissage à l’extérieur sont en hausse de 7 000 € par rapport au réalisé estimé en 2022, suite à l’augmentation du taux d’occupation et à la hausse de l’entretien des tenues des vacataires. Les dépenses prévues pour les produits d’entretien sont prévues en hausse de 3 300 € (+ 25,52 %).

A noter l’inscription de 4 800 € pour l’entretien du jardin, qui en a bien besoin.

Les charges afférentes au personnel sont prévues à hauteur de 1 898 793 €. Cela représente une hausse de 94 182,68 € par rapport au réalisé estimé de 2022 (+ 5,22%). Cette augmentation est due à la prise en compte en année pleine de la revalorisation des carrières des agents de catégorie C, de la hausse du SMIC et du dégel du point d’indice.

Les charges afférentes à la structure sont prévues à hauteur de 419 929 €. Cela représente une augmentation de 48 606,55 € par rapport au réalisé estimé de 2022 (+13,09%). Cette hausse résulte notamment de l’augmentation du loyer prévisionnel payé à Axentia suite aux travaux qui devraient être réalisés par ce dernier en 2023. Pour rappel, en 2021, la municipalité a accepté le transfert de propriété du bâtiment d’Essonne Habitat à la SA d’HLM Axentia (lire ICI). 

Alors que le bail à construction allait s’achever en 2031, la ville s’est engagée pour 21 années supplémentaires, jusqu’en 2052, pour un loyer annuel de base de 12 000 €. Cette opération n’est vraiment pas une bonne chose, dans la mesure où l’EHPAD doit en plus rembourser la taxe foncière à laquelle le propriétaire Axentia est assujetti et prend directement en charge des dépenses d’équipement à hauteur de 332 750 € pour notamment la rénovation de la toiture, l’acquisition d’un nouveau portail et des remises aux normes électriques. Au total, les charges d’exploitation pour 2023 sont évaluées, ainsi, à 2 982 663 € (contre 2 561 875 € en 2022).

Les recettes liées à l’hébergement, qu’elles soient prises en charge par le département au titre de l’aide sociale ou par les résidents sont estimées à 1 270 000 € pour 2023 avec une amélioration progressive du taux d’occupation à 96,15% (50 résidents pour 52 hébergements permanents et 1 hébergement temporaire).

Les recettes liées à la dépendance, qu’elles soient prises en charge par le département ou les résidents, sont prévues en hausse de 25 800 € par rapport au réalisé de 2022. Par contre la dotation globale soins versée par l’ARS (Agence Régionale de Santé) est en baisse de 95 044,65 € par rapport à 2022.

Enfin, sans que l’on sache vraiment pourquoi, (« faire pression sur les autres financeurs », a dit M. de Boishue) la participation du C.C.A.S. diminue fortement de 178 920 € versés en 2022 à 80 000 € prévus en 2023. Au total, les produits d’exploitation pour 2023 sont évalués ainsi à 2 691 945,39 €, ce qui entraîne le déficit prévisionnel de 290 717,61 € évoqué plus haut.

J’ai donc voté CONTRE ces trois budgets inquiétants, qui démontrent que le temps du "quoi qu’il en coûte" pour préserver un niveau minimum de solidarité et d’action sociale n’est plus à l’ordre du jour.

Analyse des besoins sociaux

Le Code de l’action sociale et des familles précise depuis 2016 qu’une Analyse des Besoins Sociaux (ABS) doit faire "l’objet d’un rapport présenté au Conseil d’administration du CCAS au cours de l’année civile qui suit chaque renouvellement général des Conseils municipaux". Ce renouvellement a eu lieu en mars 2020, mais il a fallu attendre octobre 2021 pour que le CCAS confie au bureau d’étude privé Compas la réalisation de cet ABS.

Selon le devis que j’ai pu consulter concernant la phase 1 "d’identification et de compréhension des enjeux locaux de cohésion sociale", la prestation est de 9 180 € TTC. Au total, 15 350 € ont été inscrits sur le budget 2022 du CCAS, sans que l’on sache ce qui a été dépensé et rien n’est mentionné sur le budget 2023.

Le 18 janvier, j’étais convié, en tant qu’administrateur du CCAS, à une « restitution du portrait social » de la ville. Pendant près de deux heures, le directeur d’étude du cabinet Compas a présenté de nombreuses statistiques, à partir de données INSEE, issues du recensement 2019 de la population. Difficile ici de retranscrire la multitude de chiffres ainsi compilés d’autant plus que la municipalité a refusé de nous transmettre le document (format power-point) présenté, au motif que des précisions et des corrections devaient encore être apportées. J’ai quand même relevé qu’il y a 28% de familles monoparentales à St Michel et parmi celles-ci, 24% vivent sous le seuil de pauvreté. On constate également que la "fragilité" des 5 160 jeunes de moins de 18 ans est plus forte qu’ailleurs. Au total, le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté a augmenté de 14% de 2016 à 2019. Autre défi, le vieillissement de la population. En 2019, la ville comptait 4266 personnes âgées de 60 ans et plus (21% de la population). Les projections prévoient 6 100 seniors dans 10 ans et plus de 7 000 dans 20 ans, avec une augmentation importante des plus de 75 ans. Autant de conséquences qu’il appartient d’anticiper au niveau municipal, en terme de maintien à domicile, faute de structures d’accueil suffisantes pour les personnes âgées dépendantes.

Lors de cette réunion du CCAS du 15 février, j’ai donc une nouvelle fois demandé communication du document. Mme Dacoury-Tabley a de nouveau refusé, au prétexte que la mission n’est pas terminée. Celui-ci doit donc se poursuivre à travers la mise en place de groupes de travail pour approfondir certains points sur les populations jeunes et « invisibles »… En attendant, la prise en compte des besoins sociaux pour agir auprès des populations les plus vulnérables, attendra encore.

Étrange conception, dans le domaine social, comme dans celui de l’urbanisme ou du centre commercial Grand Bois. La municipalité missionne des cabinets privés, mais refuse de publier les rapports et les conclusions des études payées par les contribuables, au motif qu’il faut les finaliser… avant de les enterrer ?

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