Les vœux ennuyeux du maire

Après deux années blanches, les vœux de Madame le maire retrouvaient la salle du Centre culturel Baschet ce samedi 14 janvier. 

J’ai bien écrit "les vœux de Madame le maire", car toute la cérémonie est centrée sur sa personne. Mais ce cru 2023 était un peu morose et sonnait assez faux. D’ailleurs assez peu de Saint-Michellois étaient présents.Pourtant il y a eu pendant 15 jours un important battage médiatique. Au-delà de l’annonce mentionnée quatre fois, avec le carton d’invitation inséré dans le journal communal, plus en doublon les multiples cartons imprimés et envoyés sous enveloppe par la poste (à 0,89€ l’unité), sans oublier les affiches et calicots dans la ville, les réseaux sociaux ont rappelé aux Saint-Michellois presque quotidiennement le rendez-vous important et incontournable du 14 janvier.

"L’ouverture des portes" était annoncée pour 14h30. Pourtant dès 13h50, quatre policiers municipaux, lourdement armés, filtraient l’arrivée des personnalités qui avaient droit à une place de stationnement réservée sur le parvis. A l’entrée du SAS, 3 agents de sécurité (privé ?) sont en poste. A 14h20, les portes ont été ouvertes aux quelques dizaines de personnes déjà là. Les membres du cabinet du maire avaient terminé les derniers réglages à l’intérieur.

Après avoir stationné ma voiture rue Aristide Briand, je suis arrivé vers 14h45. Le temps d’échanger un peu avec les 4 militants du PCF qui distribuaient une lettre ouverte au maire sur la révision du PLU (j’en parlerai une autre fois), j’ai pu rapidement pénétrer dans la salle. La foule attendue n’était pas au rendez-vous, puisque la plupart des gens étaient déjà très vite entrés. Et dans la salle, si on enlève les élu-es des autres communes, les diverses personnalités présentes, les élus du Conseil municipal, les parents accompagnant les conseillers municipaux enfants, les militants LR de la circonscrition et les agents municipaux, une petite centaine d'habitants de Saint-Michel étaient présents.

J’ai rapidement salué les agents municipaux affectés au vestiaire, puis j’ai effectué le passage obligé devant Mme le Maire. Je lui ai présenté mes vœux, tout en lui rappelant que je l’avais déjà fait par écrit dix jours plus tôt, mais qu’elle ne m’avait toujours pas répondu. J’ai également salué chacun des élu-e-s de la majorité, docilement alignés dans sa suite.

Que le spectacle commence !

Nous avons eu droit au traditionnel clip de l’année écoulée. En fait essentiellement les belles images des rassemblements festifs de l’année écoulée, avec principalement des enfants, des jeunes, de la vie, du dynamisme sur une fond musical entraînant. Eh bien sûr Madame le maire, habilement intercalée plusieurs fois, en séquence émotion et sourire. Du bon travail de propagande.

Comme chaque année, les jeunes du Conseil municipal des enfants ont été mis à contribution pour lire un texte bien articulé autour de la thématique écologique dans laquelle la municipalité veut s’inscrire. Il manquait cependant un peu de spontanéité à tout ça. Pourquoi ne pas demander à ces enfants d’écrire eux-mêmes un texte avec leurs vrais mots et leurs expressions ?

Puis l’ensemble du Conseil municipal a été invité à monter sur l’estrade. J’y suis donc allé avec mon collègue Christian Piccolo. Mais vous ne nous verrez pas sur les images et les photos. Nous étions relégués dans la pénombre au deuxième rang des conseillers municipaux, alignés 1m50 derrière Madame le maire, afin qu’elle bénéficie au maximum de la lumière.

Cette année, comme il n’y a pas d’élection au Conseil Régional, nous n’avons pas eu l’honneur d’accueillir Valérie Pécresse. Elle n’a même pas été citée, comme excusée. Visiblement, le traumatisme de son très petit score aux élections présidentielles reste vivace chez les élus et militants LR. Mais je pense également que Mme Pécresse s’épargne un maximum de sorties en Ile-de-France. Elle risque en effet de croiser sur son chemin beaucoup de personnes très mécontentes du délabrement des transports publics, de la hausse du Passe Navigo ou du mauvais entretien des Lycées, pour ne citer que ces exemples.

Par contre, comme chaque année, le président du Conseil général nous a fait son numéro habituel en trois parties : 1/ la politique menée par le Conseil départemental est formidable dans le contexte très difficile. 2/ Saint-Michel sur Orge est une ville formidable et le Conseil départemental y met beaucoup d’argents (en fait, nos impôts !). 3/ "Sophie" est une élue formidable. Il est fier de l’avoir dans son équipe depuis 8 ans et les Saint-Michellois ont vraiment de la chance d’avoir un maire aussi dynamique et exceptionnel. A la fin, je m’attendais à un roulement de tambour, un feu d’artifice. Il n’en fut rien, et les applaudissements convenus ne furent pas des plus enthousiastes.

Puis nous avons donc eu droit au discours de Madame le maire. Je ne vais pas le reprendre en détail. Pour ceux qui veulent se faire une opinion, la vidéo est sur le site de la ville et une grande partie de l’écrit sera sans doute reproduite dans le prochain journal  municipal. Autant j’avais gardé une bonne impression sur la forme de ses précédentes prestations et pris bonne note d’un contenu assez sérieux et complet, même si je ne le partageais pas forcément, autant cette année beaucoup de choses sonnaient faux et de nombreux sujets importants n’ont pas été abordés.

J’évacue tout de suite les séquences "émotions" surjouées chaque année : le souvenir de la petite fille traversant le bois du Bois des Roches pour aller au collège, le remerciement aux agents municipaux, mais d’abord à ses collaborateurs au sein de son cabinet pléthorique, puis l’hommage, en fausse pudeur, à ses proches et sa famille. Je ne développerai pas, non plus, les deux passages classiques qui reviennent systématiquement. Tout d’abord sur les réseaux sociaux qu’elle utilise abondamment, mais qui parfois sont bien méchants dès qu’il y a des expressions de mécontentement. Puis la glorification et l’exclusivité de cette majorité municipale (indemnisée) qui l’accompagne et qui travaille, comme si les élus de l’opposition (totalement bénévoles) ne valaient rien et ne faisaient rien. Vouloir systématiquement nous mépriser et nous invisibiliser, atteste sans doute d’une certaine fragilité, malgré toute l’arrogance déployée.

Aux vœux de 2022, le slogan du maire était "rallumons les étoiles". Un objectif ambitieux qu’il était bien compliqué de traduire concrètement à l’échelon de notre commune. Et au-delà, indépendamment de toute la bonne volonté de Sophie Rigault, il y a eu la guerre en Ukraine, l’accentuation de la crise climatique, la poursuite du délabrement des services publics (santé, éducation et transport notamment), sans oublier les difficultés économiques, la précarisation accrue, l’inflation galopante et les régressions sociales qui se poursuivent.

Pour 2023, le slogan était donc "cultivons demain". Un retour les pieds sur terre pourrait-on s’amuser à écrire. L’objectif semble être de décliner une démarche de développement durable, effectivement indispensable après des années de bétonnage de la ville. Si le plan de communication est prêt, nous ne distinguons pas vraiment la cohérence globale qui devrait conduire à une planification écologique avec et pour tous les habitants. J’ai relevé quatre projets mis en exergue dans le discours :

- La révision du Plan Local d'Urbanisme pour "assurer sur le temps long un équilibre entre les architectures urbaines et paysagères". La délibération lançant cette procédure a été votée il y a plus d’un an maintenant, en décembre 2021. La procédure de concertation avec les habitants est vraiment balbutiante autour d’un questionnaire sur internet. Les expressions des habitants seront-elles vraiment partagées ? En tout cas, à cette étape, la municipalité ne dit absolument rien sur ces intentions.

- La sobriété énergétique des équipements publics pour maîtriser l'utilisation des ressources. Le maire nous dit que la température est déjà à 19°, comme cela est préconisé aujourd’hui. Pour ce qui est de l’éclairage publique, 65% des sondés express, juste avant Noël, ont choisi que l’éclairage soit éteint de 1h à 5h du matin, "excepté sur les grands axes et les principaux lieux de passage ou lieux de vie (places publiques, gymnases, abords des écoles, etc.)". La mesure, de la compétence de la Communauté d’agglomération, doit s’appliquer courant janvier. Mais on ne connaît toujours pas les rues concernées.

- Le développement des mobilités douces (plan vélo) pour encourager les modes de déplacement alternatifs à la voiture. Déjà annoncé lors des vœux de 2019, la première réalisation se limitera à un itinéraire cyclable dessiné sur la voirie conduisant de la gare RER au Techniparc, en passant par la rue d’Enfer et la rue du Clos Giboux. Pas si simple à pratiquer en vélo !

- Enfin, la création de jardins familiaux au bout de la rue de la Fontaine de l’Orme, derrière Villagexpo, est de nouveau annoncée, comme en janvier 2022. Rappelons que l’aménagement des terrains avait été confié au SIREDOM il y a trois ans. Depuis, celui-ci s’est rétracté et le flou demeure. S’il doit y avoir des jardins familiaux, ceux-ci doivent être élaborés dans un cadre collaboratif avec les habitants intéressés. A voir !

J’ai relevé également dans ce discours décousu, un passage assez confus sur les modalités d’attribution des logements sociaux. Un peu comme si la municipalité avait besoin de se justifier sur l’opacité qui règne et de renvoyer la responsabilité des attributions sur les bailleurs sociaux.

Enfin, la séquence culturelle centrée sur l’acquisition (370 000 €) par la commune de la "Maison Baschet", à côté du Rû de Fleury, dans le quartier ancien (Conseil municipal du 8 décembre 2023). Le contenu du projet d’un nouveau centre culturel reste très vague. Mais Sophie Rigault fait totalement l’impasse sur l’utilisation et l’aménagement des trois parcelles non bâties jouxtant la maison et la grange (près de 2 000 m² et la destination prévue, juste à côté, (19 et 21 rue des Fusillés de la Résistance) des deux parcelles de 1 500 m² et 767 m² (ancien garage Denize) préemptées par la municipalité en mars et juin 2009 pour un total de 667 500 €.

Beaucoup d’impasses !

Même si effectivement tous les sujets ne peuvent pas être évoqués, il est quand même assez surprenant que ce discours insipide fasse l’impasse sur plusieurs dossiers structurants, restés en jachère. Il aurait pourtant été intéressant que Sophie Rigault donne quelques échéances et perspectives.

- L’aménagement de la place Marcel Carné (action mature n° 2 du fameux dispositif Action Cœur de Ville), qui aurait dû débuter à l’automne dernier.

- La galerie du centre commercial Grand Bois, qui continue de se dégrader et qui était l’objectif initial principal d’Action Cœur de Ville.

- Les locaux de l’ancienne maison des associations (rue de la Noue Rousseau) et de l’ancienne bibliothèque (avenue Saint-Saëns), inutilisés depuis plusieurs années.

- Les travaux aux abords de la gare, dont on attend depuis septembre 2021 la réunion de concertation.

Madame le maire a également oublié d’annoncer pour 2023 la revalorisation de 7,1 % des bases pour le calcul de la taxe foncière et l’augmentation de 27% de la part assainissement-épuration sur les factures d’eau. Cependant, elle continue à affirmer que "la ville se modernise et se transforme sans hausse des impôts locaux". Ce n’est pas ce que vont s’apercevoir les Saint-Michellois sur leur feuille d’impôts locaux en 2023. Bonne année quand même !

 

Post-scriptum 1 :

Consternant "oubli" sur la page facebook de Madame le maire concernant la liste des personnalités présentes. Étrangement, parmi les élu-e-s, seul le nom et le prénom du député Antoine Léaument n'apparaît pas.

"Merci au Préfet de l'Essonne et au sous-prefet de l’arrondissement de Palaiseau, aux 5 sénateurs de l’Essonne Laure Darcos, Jocelyne Guidez, Daphné Ract-madoux, Jean-Raymond Hugonet, Vincent Delahaye, au député de la circonscription, au vice-président de la Région Stéphane Beaudet, au président du Département François Durovray, à mes collègues conseillers départementaux Nicolas Méary, Cendrine Chaumont, Dany Boyer, Paolo De Carvalho, Annie Pioffet, au président de Coeur d’Essonne agglomération Éric Braive, à mes collègues maires Jean-Pierre Lecomte, Edwige Huot-marchand, Véronique Mayeur, Christian Lardière, Florian Gallant, les représentants des maires de Morsang et de Marolles, les élus des villes voisines, les pompiers, la police, les associations, la communauté éducative et culturelle, les partenaires publics, privés, d’être venus aujourd’hui".

Post-scriptum 2 :

Mal à l’aise face aux commentaires sur sa page relevant cet oubli ou incident technique, Sophie Rigault reste dans le déni. Et après la suppression de plusieurs commentaires, sa page mentionne désormais : "Sophie Rigault a limité qui peut commenter cette publication". Une façon de n’autoriser que les louanges de son fan club !

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