Pass sanitaire - vaccin – démocratie

J’ai un long texte "en chantier" depuis l’intervention du Président Macron le 12 juillet dernier. Mais je dois vous avouer ma difficulté à le terminer, car rien ne semble vraiment fixé pour le publier sereinement.

En effet les débats actuels sur le projet de loi que présente le gouvernement sont à la fois multiples, complexes, mais également très agités, voir même parfois violents, avec des termes et des comportements tout à fait inacceptables en référence à la Shoah et à l’apartheid, notamment.

Comme beaucoup d'autres, je me suis librement fait vacciner, mais je n'ai pas envie de vivre dans une société de contrôle généralisé. Je considère qu’il faut traiter avec calme la situation après un examen contradictoire constructif. Que l’on soit opposant ou défenseur du pass sanitaire et du vaccin, nous sommes tous légitimes à réclamer des éclaircissements sur la nécessité de maintenir un état d’urgence sanitaire dont on n’entrevoit désormais plus la fin. En esquivant tout véritable débat, l’autoritarisme du gouvernement Macron affaiblit encore sa crédibilité et traite dangereusement le citoyen en idiot.

Je vais donc attendre que la séquence parlementaire soit close et que le Conseil Constitutionnel se prononce pour m’exprimer sur les dispositions définitives de la loi qui sera publiée et les modalités d’application que le gouvernement devra prendre sans doute par décret au mois d’août.

Cependant, vous trouverez ci-dessous l’intégralité de la tribune publiée hier, jeudi 22 juillet 2021 dans le journal Libération qui résume parfaitement mon état d’esprit et mes réflexions à cette étape.

Refusons le projet de loi sanitaire et les régressions sociales

Le pass sanitaire marquera la vie de millions de Français·es, puisqu’en très peu de temps, et encore plus dès lors que le test PCR ne sera plus gratuit, toute vie sociale et professionnelle sera contrainte par le fait d’être vacciné. Pourtant, cette décision a été prise de façon autoritaire, non démocratique, dans un cadre de délibérations obscures, celui d’un seul homme : le président de la République qui n’aura réuni que le seul Conseil de défense. Elle passe outre toute discussion réelle au Parlement qui est, une fois encore, considérée comme une chambre d’enregistrement. La démocratie ne saurait être sacrifiée, et elle est pour nous plus que jamais la clé pour sortir de cette crise.

Pourtant, il y a moins d’un mois, Emmanuel Macron, le ministre de la santé, les député.es de la majorité, à l’image de la présidente de la commission des lois qui avait même déposé un amendement pour en figer l’impossibilité d’avoir une obligation publique dans la loi, tou.te.s se disaient opposées à la généralisation du pass sanitaire au nom des libertés et individuelles tout comme à une vaccinale. Alors que tout indique que nous avons pour au moins des mois à vivre avec le virus, on ne peut rentrer dans la société du contrôle généralisé que le gouvernement veut imposer ainsi à la population.

Une vaccination large et massive est nécessaire pour combattre cette pandémie, à commencer par la couverture des plus fragiles. Nous nous démarquons de toutes celles et ceux qui font de leur opposition frontale au vaccin un déversoir sectaire et complotiste et nous dénonçons fermement toute assimilation de la stratégie vaccinale à la Shoah ou à l'apartheid.

Le pass sanitaire est antisocial

Nous dénonçons la méthode employée par le gouvernement, génératrice de fortes tensions, ce qui est délétère en pleine crise épidémique. Les premiers leviers activés devraient être un grand débat démocratique, une information d’ampleur, des droits d’utilisation sur le temps de travail pour se faire vacciner, une prévention notamment par la gratuité des masques, une couverture bien plus importante des centres de vaccination et des moyens associés plus conséquents… La corrélation entre la vaccination et les revenus fait dire qu’en l’état actuel le pass sanitaire est antisocial. Ce sont des milliers de milliers de travailleurs·se·s qui se trouvent contraint·es et menacé·es de sanctions graves.

Depuis le début de la pandémie, les moyens financiers et humains réclamés par les syndicats et associations de soignants, pour remettre debout les hôpitaux publics et soigner correctement, n’ont pas été octroyés. Il en est de même pour les Ehpad. Pire, dans certains endroits nous constatons même que la casse de l’hôpital public continue (fermeture de lits, suppressions de poste…).

Et pendant ce temps, la France s’oppose toujours, avec l’Union européenne, à la levée des brevets au sein de l’Organisation mondiale du commerce, alors que c’est la seule façon pour que, dans les pays pauvres et émergents, les vaccins puissent être fabriqués et distribués massivement. C’est à la fois une question de solidarité internationale, de santé publique et d’efficacité. Car tant que la pandémie ne sera pas résolue à l’échelle mondiale, elle ne le sera nulle part.

Enfin, pendant que ces décisions heurtent et divisent la population, de graves attaques contre les droits sociaux sont annoncées. Autoritarisme et casse sociale vont de pair. La réforme régressive de l’assurance-chômage serait entérinée dès le 1er octobre, diminuant fortement les durées et les montants des allocations des chômeurs. Et Emmanuel Macron a confirmé sa volonté de reporter l’âge légal de départ en retraite et la fin de tous les régimes spéciaux. Alors que le patrimoine cumulé des 500 plus grandes fortunes de France a augmenté de 30% en 2020, le gouvernement ne revient aucunement sur toutes les largesses qu’il leur a accordées depuis le début du quinquennat et veut faire payer la crise aux chômeurs et aux retraités. A l’inverse, nous demandons que soient mis à contribution, bien davantage qu’aujourd’hui, les multinationales et les très riches, au profit de la solidarité nationale. Nous exigeons une politique sociale ambitieuse, passant par des services publics de qualité et des droits sociaux plus importants.

Pour cette raison, au nom de l’efficacité sur le long terme contre l’épidémie et pour préserver nos libertés, nous nous opposons à la nouvelle loi proposée à l’assemblée, tout comme aux mesures antisociales qui visent à faire payer la note de la crise sociale au monde du travail. A cette fin, nous aspirons à des mobilisations dans les semaines et mois qui viennent.

Premiers signataires

Responsables d’organisations : Aurélie Trouvé et Raphaël Pradeau (porte-parole d’Attac), Céline Verzeletti (secrétaire confédérale de la CGT), Simon Duteil et Murielle Guilbert (délégué·es généraux de l’Union syndicale Solidaires), Thomas Portes (porte-parole de Génération·s), Mélanie Luce (présidente de l’UNEF), Khaled Gaiji (président des Amis de la Terre France), Pierre Khalfa et Willy Pelletier (Fondation Copernic), Emmanuel Vire (secrétaire général du SNJ-CGT), Mireille Stivala (secrétaire générale de la fédération CGT Santé et action sociale), Jean Marc Devauchelle (secrétaire général de la Fédération SUD Santé Sociaux), Thierry Amouroux (porte-parole du Syndicat National des Professionnels Infirmiers SNPI), Hafsa Askar (Secrétaire Générale de la FSE), Denis Lalys (secrétaire général de la FNPOS de la CGT), Ana Azaria (présidente Femmes égalité), Lenny Gras (porte-parole du MNL), Mathieu Devlaminck (UNL), Aneth Hembert (co-secrétaire fédérale des Jeunes Ecologistes), Jean-Christophe Sellin et Hélène Le Cacheux (coordinateurs du Parti de Gauche), Jean-François Pellissier et Myriam Martin (porte-parole d’ENSEMBLE !), Christine Poupin, Olivier Besancenot et Philippe Poutou (porte-parole du NPA), Christian Pierrel (porte-parole du PCOF), Christian Eyschen (secrétaire général de la Libre Pensée), Martin Méchin et Louise Tort (Black Robe Brigade), Anthony Caillé (CGT-Police), Jean-Baptiste Eyraud (porte-parole Droit Au Logement), Delphine Glachant (présidente de l’Union syndicale de la psychiatrie).

Elu·e·s : Éric Coquerel (député LFI), Elsa Faucillon (députée PCF), Eric Piolle (maire EELV), Jean-Luc Mélenchon (député LFI), Sébastien Jumel (député PCF), Emilie Carriou (députée Nouveaux Démocrates), Clémentine Autain (députée LFI), Aurélien Taché (député Nouveaux Démocrates), Mathilde Panot (députée LFI), Pierre Dhareville (député PCF), Caroline Fiat (députée LFI), Manon Aubry (députée LFI), Adrien Quatennens (député LFI), François Ruffin (député LFI), Muriel Ressiguier (députée LFI)

Personnalités : Youcef Brakni (militant antiraciste), Sandrine Rousseau (EELV), Caroline Mecary (avocate), Taha Bouhafs (journaliste), Jean-Marie Harribey (économiste), Arie Alimi (avocat), Kevin Vacher et Deborah Ozil (Rencontre des Justices), Stéphane Jouteux (syndicaliste), Nicolas Mayart (journaliste), Dominique Plihon (économiste), Paul Poulain (spécialiste des risques industriels), Laure Vermeersch (L’ACID), Gilles Perret (réalisateur), Rokhaya Diallo (journaliste), Claire Lejeune (EELV).

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