Face aux violences : l’éducation et la prévention

Ces dernières semaines, l’actualité a été dramatiquement marquée par une succession de morts d’adolescents sur fond des rivalités entre bandes ou de harcèlements. Que ce soit à travers des rixes programmées, de bagarres qui dégénèrent, de règlements de compte qui dérapent ou de violences préméditées, tout ceci est effroyable.

Ces faits tragiques sont bouleversants. Passé le temps de la sidération, de l’incompréhension et de la colère, il nous à la fois tenter d’analyser les causes et réfléchir aux solutions pour prévenir leurs renouvellements et s’armer collectivement pour éviter ces drames terribles.

Tout d’abord chacun doit faire preuve d’une très grande humilité. En premier lieu, les dirigeants politiques qui se précipitent pour vanter de nouveau une panoplie de mesures ultra sécuritaires et appeler à une plus grande responsabilité des parents. Ces tensions ne sont pas nouvelles, et chacun a bien conscience que le contexte Covid, avec ses multiples contraintes, exacerbe encore davantage des situations fragiles et des repères perdus. L’influence grandissante des réseaux sociaux et leur grande médiatisation accentue également les rivalités, les insultes, les colères, les débordements en tout genre. Tenter de l’expliquer, ne veut pas dire excuser. Mais il faut bien dire que les alertes, nombreuses, de différents professionnels dans les secteurs de l’éducation et de la prévention n’ont pas été prises au sérieux.

Notre société toute entière a d’abord un devoir d’éducation et de protection envers les enfants, les adolescents et les jeunes adultes. Or, depuis des décennies on constate partout l’insuffisance, voire même l’absence de moyens pour les services publics d’éducation et de protection de l’enfance, de prévention spécialisée et de médiation. Dans un monde de plus en plus inégalitaire, individualiste et égoïste, sans perspective dans beaucoup de quartiers, se regrouper en bande est parfois une manière de se réconforter, de se protéger, voir de rechercher des confrontations pour se prouver qu’on existe.

Le monde associatif, souvent présent, repose sur des bonnes volontés souvent énergiques. Mais il ne peut combler le vide, laissé par la diminution des services publics, le manque de locaux pour l’accueil des publics jeunes et la baisse des subventions. Désœuvrement, frustration, déscolarisation, errance… les processus s’accélèrent vite, trop vite…

Il est urgent de définir une politique de soins en direction des jeunes en grande souffrance psychologique avec le renforcement des services de pédopsychiatrie et de CMP en nombre suffisant et accessibles, pour détecter les difficultés le plus tôt possible.

Il faut donc davantage miser sur l’éducation avec à tous les niveaux une réduction des effectifs par classe qui permette aux enseignants d’assurer un enseignement de meilleure qualité et un suivi plus individualisé des élèves.

Il faut véritablement renforcer les services de la prévention spécialisée et de la protection de l’enfance.

Il faut créer des postes supplémentaires de médiateurs sociaux, mieux formés, davantage disponibles dans les espaces publics sur des horaires plus appropriés.

Il faut renforcer de la place et le rôle des parents, sans stigmatisation bien inutiles.

Il faut soutenir davantage les associations sportives et culturelles afin qu’elles puissent accueillir et encadrer un maximum de jeunes.

Il faut redéployer partout une véritable police républicaine de proximité.

Il faut enfin faire vivre, avec tous les acteurs concernés, les cellules de veilles, les conseil communaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

AJOUT LE 18/03/2021 : Interview de Laurent Mucchielli*, sociologue, directeur de recherche au CNRS, enseignant à l'Université d'Aix-Marseille et président du conseil scientifique de la FCPE. Lire ICI

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